Manèges forains : les précautions à prendre pour ne pas engager sa responsabilité Abonnés
Tout forain qui souhaite installer un manège, un jeu ou une attraction doit obtenir une autorisation préalable du maire, car « nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public », l’autorisation étant temporaire, précaire et révocable (art. L 2122-1 et svts, code général de la propriété des personnes publiques, CGPPP). Le forain a l’obligation de s’acquitter d’une redevance, qui tient compte « des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation » (art. L 2125-1 et svts, CGPPP). Le conseil municipal est compétent pour fixer son montant. Toutefois, il peut donner délégation au maire pour arrêter ces tarifs (art. L 2122-22, code général des collectivités territoriales, CGCT).
Le maire peut refuser de délivrer son autorisation ou l’assortir de prescriptions en cas de risque de troubles avérés à l’ordre public. En effet, le maire est chargé de la police municipale, et notamment de :
1° tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (…) ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées ;
2° le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ;
3° le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances (…),
4° le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents (…) » (art. L 2212-2, CGCT).
Prendre un arrêté qui réglemente à l’avance l’implantation des manèges
Lorsqu’une commune est saisie de nombreuses demandes ou qu’elle organise une fête foraine importante, le maire peut édicter, à l’avance, un règlement général (sous forme d’arrêté) qui pourra prévoir des heures d’ouverture et de fermeture de la fête, la répartition des emplacements par type d’activités, un marquage au sol, des limites acoustiques, etc. Le maire pourra délivrer les autorisations au vu de ce règlement général. Ce règlement général doit être pris pour prévenir les troubles à l’ordre public, et comporter des mesures utiles et adéquates. Rappel : « en cas d'inobservation de ses clauses et conditions ou pour un motif d'intérêt général, il peut être mis fin à l'autorisation d'occupation ou d'utilisation temporaire du domaine public » (art. R 2122-7, CGPPP).
Un maire peut interdire des attractions qui seraient indignes pour la personne humaine, tels les simulacres d’exécution par chaise électrique ou les lancers de nains (Conseil d’Etat, CE, n° 143578, 27/10/1995).
En outre, le maire devra toujours veiller à l’existence d’une distance suffisante entre l’implantation des manèges et les voies ouvertes à la circulation générale. Dans une affaire, un enfant tombe d’une plate-forme entourant le manège d’auto-tamponneuses. Il roule jusqu’à une route, où un véhicule le percute. Il est grièvement blessé. La responsabilité de la commune est engagée (Cour administrative d’appel de Nancy, n° 91NC00012, 14/11/1991). De même, le maire devra proposer aux forains des sites ne présentant pas de risque pour la sécurité publique (raccordements électriques, accès pompiers, etc.) mais également pour leurs propres installations. Un maire autorise un forain à s’installer à proximité d’un arbre. Ce dernier montre des signes de maladie, puis finit par tomber sur le manège qui est très endommagé. La commune est condamnée à rembourser le coût de réparation du manège et le préjudice commercial du forain (CAA de Nantes, n° 96NT00070, 10/03/2010).
Expulser les forains sans droit ni titre
La commune peut faire expulser les forains sans droit ni titre. Rappelons que la commune est susceptible d’engager sa responsabilité administrative, voire pénale si elle a toléré un forain et qu’un accident se produit. Lorsque les forains s’installent sans autorisation sur des parkings municipaux, des voies communales, des trottoirs, sur des places ouvertes à la circulation générale (c’est-à-dire sur le domaine public routier communal), ils commettent une contravention de voirie routière passible d’une amende de 1 500 € (art. R 116-2, code de la voirie routière, CVR). Le maire doit alors faire dresser procès-verbal, transmettre le dossier au parquet et se constituer partie civile pour exiger une expulsion, le cas échéant, par référé (art. L 116-1 et svts, R 116-1 et svts, CVR, voir le dossier de la lettre Police Municipale n° 2).
Ainsi, commet une contravention de voirie routière le camelot qui s’installe sans aucune autorisation sur un parking (CC, n° 79-92576 du 4/03/1980) ou encore le forain implanté illégalement sur un trottoir (Conseil d’Etat, n° 124709, 28/12/1992). Une fois que le juge a autorisé l’expulsion, il est nécessaire de demander le concours de la force publique au préfet.
Lorsque le forain s’installe sur le domaine public communal mais qu’il ne s’agit pas du domaine public routier, il convient de saisir le juge administratif en référé. Ainsi, « en cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative » (art. L 521-3, code de justice administrative). Trois conditions sont alors requises pour mettre en œuvre ces dispositions :
1/ une mise en demeure doit être adressée à l’occupant ;
2/ il existe une urgence réelle à faire évacuer les lieux ;
3/ il n’existe pas de contestation sérieuse sur la demande de la commune.
Toutefois, si ces conditions ne sont pas satisfaites, la commune doit saisir le tribunal administratif par une requête ordinaire en sollicitant l’expulsion, après mise en demeure adressée à l’occupant. L’autorisation du juge obtenue, le concours de la force publique au préfet est requise.
Dans certaines situations, le maire peut intervenir sans obtenir d’autorisation préalable du juge. Ainsi, « en cas de danger grave ou imminent (…), le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. Il informe d'urgence le préfet et lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites » (art. L 2212-4, CGCT). La jurisprudence précise qu’il est « en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent ». Le maire peut alors « faire légalement usage de ses pouvoirs de police générale, et notamment prescrire l'exécution des mesures de sécurité qui sont nécessaires et appropriées à cette situation » (Conseil d’Etat, n° 04592, 20/06/1980 ; Cour administrative d’appel de Marseille, n° 08MA02140, 18/10/2010).
Le maire doit exiger les documents attestant de la parfaite sécurité du manège
Le maire doit exiger de chaque forain :
1/ les conclusions du rapport de contrôle technique ou du rapport de vérification et, le cas échéant, du rapport de contre-visite en cours de validité et comportant des conclusions favorables ;
2/ le cas échéant, une déclaration établie par l'exploitant précisant qu'il a réalisé les actions correctives nécessaires et que son matériel est maintenu en bon état, accompagnée des documents justificatifs ;
3/ à l'issue de l'installation du matériel, l'exploitant remet au maire une attestation de bon montage et, si le matériel a fait l'objet d'un nouveau contrôle après la demande d'installation, le ou les rapports mentionnés au 1/.
Le maire peut interdire l'exploitation du matériel, la subordonner à des réparations ou modifications ou à la réalisation d'un nouveau contrôle technique si les constatations effectuées ou l'examen des documents mentionnés le justifient (art. 11, décret n° 2008-1458 du 30/12/2008).
Le maire pourra prendre ultérieurement toute autre mesure de police qui serait nécessaire. En cas de problème de fonctionnement du manège, il doit également aviser immédiatement le préfet.
Les forains doivent afficher le nom de leur contrôleur technique et la date de la dernière visite, de façon visible par le public. Ils doivent être en possession d’un dossier technique comportant les caractéristiques techniques du manège, la nature et la date des opérations de contrôle, de réparation et d’entretien.
Sources : loi n° 2008-136 du 13/02/2008 relative à la sécurité des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attractions ; décret n° 2008-1458 du 30/12/2008 ; arrêté du 12/03/2009.
Antoine Laloy le 01 juillet 2016 - n°9 de Police municipale et Pouvoirs de police du maire
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