Connaître et éviter le délit d’abus d’autorité Abonnés
Le délit d’abus d’autorité en trois éléments
Comme tout délit, l’abus d’autorité est composé de trois éléments : un élément textuel, un élément matériel et un élément intentionnel.
— L’élément textuel est le fondement légal du délit, c’est-à-dire l’article 432-1 du code pénal.
— L’élément matériel consiste à « prendre des mesures destinées à faire échec à l'exécution de la loi ». La loi est ici entendue strictement : il ne s’agit pas de faire obstacle à l’exécution des mesures réglementaires, comme le règlement d’un plan local d’urbanisme - PLU (Cour d’appel de Douai, 15/12/2005).
— L’élément intentionnel du délit résulte pour son auteur de faire sciemment obstacle à l’exécution d’une loi. Pour la jurisprudence, peu importe les mobiles et que le maire ait été animé par des convictions politiques, sociales, religieuses ou encore morales.
Le maire ne doit pas empêcher les policiers municipaux d’appliquer la loi
C’est généralement avec les relations entre le maire et la police municipale que la jurisprudence illustre la commission du délit d’abus d’autorité.
Dans une affaire, un maire adresse une note de service aux agents de police municipale, leur indiquant qu’ils peuvent porter des armes de type 357 magnum. Or, les conditions de port d’une telle arme n’étaient pas réunies pour ce service de police municipale, compte tenu des textes alors applicables. Le maire allègue bénéficier d’une « dérogation ministérielle ». Mais bien au contraire, le préfet lui écrit pour lui indiquer qu’il se place dans une situation illégale. Le maire est renvoyé devant les tribunaux du chef d’abus d’autorité (Cour de Cassation, n° 05-83702, 6/11/2007).
Un automobiliste conduit très dangereusement son véhicule, ce qui représente un risque avéré pour les autres usagers de la route. Les policiers municipaux demandent au conducteur, de s’arrêter, ce qu’il refuse de faire. Il est pris en chasse. Le maire s’oppose à ce que ses policiers préviennent l’officier de policier judicaire. Ces derniers parviennent à rédiger un procès-verbal, mais incomplet car ils ne peuvent retenir à l’encontre de l’automobiliste qu’un changement de direction sans avertissement préalable. Les juges rappellent que les policiers étaient bien tenus d’aviser un officier de police judiciaire autre que le maire puisqu’il résulte de l’article 21-2 du code de procédure pénale que « sans préjudice de l'obligation de rendre compte au maire (…), les agents de police municipale rendent compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent de tous crimes, délits ou contraventions dont ils ont connaissance. Ils adressent sans délai leurs rapports et procès-verbaux simultanément au maire et, par l'intermédiaire des officiers de police judiciaire mentionnés à l'alinéa précédent, au procureur de la République ». De plus, les juges précisent également « qu’en cas de situation de délit flagrant, l’information de l’officier de police judiciaire ne supporte aucun retard ». Le maire est condamné à 4 mois de prison avec sursis (Cour de Cassation, n° 12-80081, 5/02/2013).
Le délit d’abus d’autorité peut être sévèrement sanctionné
Le délit d’abus d’autorité peut être puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende (art. 432-1, CP). Si cet abus d’autorité a été suivi d’effet, le mis en cause encourt jusqu’à dix ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende (art. 432-2, CP).
Le juge peut également prononcer des peines complémentaires d’interdiction d’exercice des droits civiques, civils et de famille pendant une période de 5 ans ainsi qu’une peine d’inéligibilité pour une période de 10 ans (voir art. 432-17, CP).
Par ailleurs, rappelons que le maire qui commet un manquement grave dans l’exercice de ses fonctions ou qui est condamné pénalement (ce qui le prive de l’autorité morale nécessaire à l’exercice de ses fonctions) est susceptible de faire l’objet d’une sanction disciplinaire. En effet, « le maire et les adjoints, après avoir été entendus ou invités à fournir des explications écrites sur les faits qui leur sont reprochés, peuvent être suspendus par arrêté ministériel motivé pour une durée qui n'excède pas un mois. Ils ne peuvent être révoqués que par décret motivé pris en conseil des ministres » (art. L 2122-16, code général des collectivités territoriales).
Enfin, constitue également un abus d’autorité « le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, ayant été officiellement informée de la décision ou de la circonstance mettant fin à ses fonctions, de continuer à les exercer ». Le mis en cause encourt une peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende » (art. 432-3, CP).
Antoine Laloy le 22 août 2016 - n°10 de Police municipale et Pouvoirs de police du maire
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