L’exercice du pouvoir de police municipale impose un déneigement des voies publiques (2ème partie) Abonnés
Les communes ne disposent pas toutes des mêmes ressources et les communes de taille modeste peuvent éprouver des difficultés à procéder au déneigement. Dans ce cas, les maires peuvent mettre en œuvre les dispositions, largement méconnues, de l’article L. 2122-28 du code général des collectivités territoriales. En effet, le maire peut prendre des arrêtés « à l'effet : 1/ d'ordonner des mesures locales sur les objets confiés par les lois à sa vigilance et à son autorité (…) ». Ainsi, les juges reconnaissent au maire la faculté d’édicter un arrêté contraignant les riverains à nettoyer le trottoir au droit de leur habitation et à le déneiger (Conseil d’Etat, n° 16199, 15/10/1980 ; Rép. Min. à Mathon Gilbert, n° 97675, JOAN du 17/04/2012). Le non-respect d’un arrêté municipal est passible d’une amende de 150 € (contravention de 2de classe ; art. 131-13, R. 610-5, code pénal). En cas d'accident, le juge appréciera si les propriétaires avaient pris les précautions nécessaires. En cas de négligence avérée, le propriétaire commet une faute qui engage sa responsabilité civile (art. 1382 et 1383 du code civil ; voir Cour de Cassation, n° 78-16360, 19/06/1980). La responsabilité pénale du riverain peut être également engagée.
A savoir : concernant les résidents d’immeubles en copropriété, l'exécution de l'arrêté prescrivant des mesures de déneigement est à la charge du syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic.
Dans les communes rurales, il est possible de recourir aux services d’un agriculteur, en lui mettant à disposition une lame communale (art. 10 de la loi n° 99-574 d’orientation agricole du 9/07/1999 modifiée ; Rép. Min. n° 104055, JO AN, QE du 7/06/2011).
Important : dans tous les cas, communes et agriculteurs doivent conclure une convention. La commune peut également confier aux agriculteurs le salage des voies.
Défendre la commune en cas d’accident
Le maire qui ne signale pas les dangers excédant ceux que l'on rencontre habituellement ou ceux contre lesquels les intéressés doivent personnellement se prémunir par leur prudence engage la responsabilité de la commune (CE, 28/04/1967). Ainsi, le maire qui ne fait pas signaler un grillage sous un amas de neige engage la responsabilité de la commune (CE, 12/05/1978). A contrario, une administratrice chute sur un trottoir enneigé et se blesse. Or, il ressort de l'attestation du responsable du service d'exploitation municipale que la commune avait procédé à des opérations de déneigement à partir de 6h30 le matin et qu'un passage sur ce trottoir avait été dégagé. Les juges estiment que « la commune ne saurait être tenue de maintenir en toutes circonstances l'ensemble de ses voies vierges de neige et de verglas. Dès lors, elle doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'absence de défaut d'entretien de l'ouvrage public. La présence de cette plaque de neige sur le trottoir n'excédait pas les risques contre lesquels l’administrée devait se prémunir en prenant toutes les précautions utiles compte tenu de ces circonstances climatiques particulières » (CAA de Nantes, n° 15NT02526, 24/02/2017).
En cas d’accident, l’usager doit démontrer, d'une part, la réalité de son préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage public enneigé et le dommage (voir pour un exemple récent, CAA de Douai, 8/06/2021, n° 20DA00626). De son côté, la commune doit montrer qu'elle a normalement entretenu l'ouvrage. Elle peut aussi objecter la propre faute de la victime. Par exemple, la commune peut relever que le plaignant ne s’est pas comporté comme un usager normalement prudent compte tenu des circonstances, ou encore qu’il avait une bonne connaissance des lieux qu’il fréquentait fréquemment (CAA de Nancy, n° 15NC00079, 21/06/2016, au sujet d’un administré ayant chuté sur un trottoir verglacé).
Important : la commune peut objecter qu’elle a rendu public un plan de déneigement avant la saison hivernale, sur lequel elle a communiqué : il est conseillé de conserver des preuves de cette communication.
La commune peut encore objecter l'existence d'un événement de force majeure.
Enfin, cette responsabilité administrative qui pèse sur la commune peut déboucher dans certaines situations sur une mise en cause pénale. Rappelons que « le maire (…) ne peut être condamné (…) pour des faits non intentionnels commis dans l'exercice de ses fonctions que s'il est établi qu'il n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi lui confie » (art. L. 2123-34, CGCT). Une telle responsabilité pourrait être soulevée, par exemple en cas d’accident mortel liés à un défaut fautif de déneigement ou en présence d’une avalanche (voir, à titre d’exemple, Cour de Cassation, n° 85-94431, 11/03/1986).
Jean-Philippe Vaudrey le 30 novembre 2023 - n°125 de Police municipale et Pouvoirs de police du maire
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